31/03/2013

Passage de témoin de Raymond AUBRAC et Renaud HELFER-AUBRAC

PARU EN 2011
Le choix de ce livre s'est fait dans le cadre de ma tournante de livres.
Je lui donnerai 6/10.
Quelques mots sur les auteurs :
Raymond Aubrac, de son vrai nom Raymond Samuel, est né en 1914 à Vesoul. Ses parents étaient des commerçants juifs aisés. Ils ont été déportés puis assassinés en même temps que leur fils Paul en 1943. Raymond Aubrac est connu principalement pour son action dans la résistance durant l'occupation allemande et le régime de Vichy pendant la seconde guerre mondiale. En 1937, il obtient son diplôme d'ingénieur civil des Ponts et Chaussées. Il a participé à la création du mouvement Libération-Sud aux côtés d'Emmanuel d'Astier de La Vigerie et secondera aussi le général Delestraint. Comme son ami Emmanuel, il est proche du régime communiste mais n'en deviendra jamais adhérent. En 1939, il épousera Lucie Bernard qui, elle, avait adhéré au parti communiste. Faits prisonniers tous les deux en 1941, ils réussiront à s'évader pour gagner la zone libre grâce à la ruse de sa femme. On recroise sa route lors de négociations entre lui et Henry Kissinger à propos du nord du Vietnam. Il est devenu très ami depuis 1946 avec Hô Chi Minh (mort en 1969). De 1948 à 1958, il a créé le BERIM (bureau d'études et de recherches pour l'industrie moderne) avec 4 autres fondateurs communistes : Marc Weil, Marcel Mosnier et René Picard. On compte aussi Stéphane Hessel parmi ses amis.  Il a été accusé par Klaus Barbie d'avoir été son complice mais aucune preuve n'a été retenue contre lui et sa femme. Il a écrit en 1996 "Où la mémoire s'attarde". Et en 2011, à quatre mains avec son petit-fils Renaud Helfer-Aubrac, ils ont rédigé "Passage de témoin".
Renaud Helfer-Aubrac est né en 1972 à Nanterre. Il est conseiller technique au cabinet du maire de Paris et en particulier concernant la démocratie locale, la vie associative, le bureau des temps, le contrôle de gestion, l'accueil des usagers et la qualité des services publics. Il est de même administrateur ONG. Il a été consultant en stratégie pour entreprises, et militant de causes humanitaires (Bosnie, Kosovo, Afghanistan). Il est diplômé de la Kennedy School de Harvard. Il est le petit-fils des résistants Raymond et Lucie Aubrac.
RESUME : Dialogue animé par Benoît Hopquin (journaliste français) entre le grand-père et son petit-fils sur la politique de façon générale intégrant la République (s'interrogeant sur sa devise liberté, égalité, fraternité),  le racisme, la justice, le conflit israélo-palestinien, la crise économique (rappel 1929), l'expulsion des sans-papiers. L'ancien a connu la barbarie nazie, a visité la Chine maoïste, le jeune a vu la montée de Barack Obama, a rencontré Massoud. Toutes ces questions se débattent entre les deux générations avec engouement et conviction.
MES IMPRESSIONS : L'idée de partager ainsi les avis de deux générations qu'une soixante d'années sépare est tout à fait remarquable. De plus, une famille marquée par l'histoire depuis 1914 est un témoignage exceptionnel. Chacun des protagonistes a joué des rôles importants au cours de son existence ce qui ajoute un intérêt supplémentaire au livre. Je peux dire que j'ai appris beaucoup de choses sur cette famille Aubrac dont j'avais vaguement entendu parler et rechercher leur biographie m'a vivement captivée. Ce sont deux hommes dynamiques et courageux qui veulent toujours aller de l'avant. Raymond Aubrac aime à dire "Mon intérêt personnel c'est le présent et l'avenir". Tout en étant bien de son époque, il affirme aussi : "J'ai été formé pour préparer l'avenir". Tous les deux, parfois en désaccord du fait qu'ils n'ont pas vécu tout à fait les mêmes évènements en raison de leur grande différence d'âge, arrivent toujours à s'écouter. Raymond veut laisser à son petit-fils cette faculté de discuter sur le fond toutes générations confondues en mélangeant le passé déjà vécu, l'expérience et ce qui arrive et va arriver. Cela permet en effet de relativiser ce qui se passe aujourd'hui chez nous et/ou dans d'autres pays. Raymond Aubrac a envie de convaincre son petit-fils mais aussi les générations de maintenant (il fait toujours des conférences malgré son grand âge). "Il faut être prêt à se battre, dit-il, et avoir confiance en soi". La conclusion de ces deux hommes c'est que l'être humain ne varie pas beaucoup. Tristement, l'histoire se répète car l'homme perd par moment la raison. Le passé aide aussi à comprendre le présent et en 2012 où la crise de l'Europe avec une monnaie menacée est traitée avec beaucoup plus de prudence qu'en 1929 où la panique avait été ingérable. Ce recul peut permettre parfois d'éviter de refaire les mêmes erreurs que nos ancêtres malgré les progrès réalisés et l'avancée incontestable de l'industrie, l'économie et autre depuis le début du XXème siècle. Evidemment, je n'ai pas pour autant attribué une note supérieure à 6/10 car j'ai trouvé que le dialogue bien que constructif n'était pas assez bien mené. En voulant faire du spontané, on a occulté sans doute un style plus littéraire et plus fluide. On sent un certain agacement de Raymond Aubrac de temps en temps sans doute dû à son grand âge et un petit-fils à plus à l'écoute que dans une vraie opposition. Je ne partage pas aussi un certain nombre de leurs idées que je n'exposerai pas dans la mesure où mon opinion est personnelle mais du coup, je n'ai pas forcément envie que certaines pensées soient véhiculées. Les idées défendues sont honorables et respectueuses, et j'en resterai là. Si vous êtes un féru d'histoire et du dialogue intergénérationnel, jetez-vous sur ce livre, il est pour vous. De toute façon, cet ouvrage ouvre à beaucoup de discussions pertinentes et actuelles.

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